Quand les villes passent leur budget au crible du climat
Pour être considéré comme favorable au climat, un collège doit avoir un bâtiment économe en énergie, mais aussi être accessible en transport et lutter contre le gaspillage.
Les collectivités locales tentent d’examiner l’impact climatique de leurs dépenses. Une tâche complexe, qui exige une comptabilité détaillée.
Quel est l’impact des dépenses des communes sur le climat ? Paris, Lille, Strasbourg et Lyon, se sont réunies pour répondre à cette question. Accompagnées par le think-tank I4CE, spécialiste du climat, mais aussi par France Urbaine et l’Ademe, elles se sont prêtées au jeu de l’analyse climatique de leur propre budget. Un projet qui enthousiasme Paul Simondon, en charge de la finance verte à la Ville de Paris, également délégué de France Urbaine. « Cet outil est un accélérateur de changement. Il permet de constater quel est l’impact de nos outils propres sur cette transition » assure-t-il.
Un outil d’aide à la décision
« C’est un outil stratégique d’aide à la décision indispensable, qui va nous permettre de mettre en place une politique des coûts évités » renchérit le président de la Commission Environnement et développement durable de l’Association des Maires de France, André Flajolet.
Concrètement, la méthode développée par I4CE classe les dépenses des communes en cinq catégories : très favorables, favorables, indéfinies, neutres et défavorables au regard de la stratégie nationale bas carbone française. Seules les dépenses classées favorables sont donc compatibles avec l’accord de Paris.
Pour l’instant, la majeure partie des dépenses des grandes communes examinées a été classée en neutre ou non définie.
« Nous n’avions pas suffisamment d’informations pour les caractériser » explique Benoit Leguet, à la tête du think-tank I4CE. Mieux les classer exige que les collectivités locales puissent divulguer plus d’informations, grâce à une comptabilité analytique plus précise.
Ainsi les dépenses de la Métropole de Lyon ont été jugées « très favorables » à hauteur de 9 % du budget, favorables pour 1 %, indéfinies pour 42 %, neutres pour 46 %, et défavorables pour 1 % des dépenses.
« Autrement dit, 90 % des dépenses ne sont pas caractérisées, ça nous montre que la marche à franchir est importante » souligne Bertrand Artigny, vice-président aux finances de la Métropole de Lyon.
Encore trop d’investissements inclassables
Selon lui, la difficulté de caractériser les dépenses dans une catégorie ou une autre est due à la pluralité des caractéristiques de certaines d’entre elles. « Par exemple, un collège peut être construit selon les normes de la RE2012, ce qui est positif, mais en dehors des zones desservies par le transport public, ou avec une consommation d’eau non maîtrisée et du gaspillage à la cantine » souligne-t-il. Il sera dans ce cas classé parmi les investissements « neutres ». Certains investissements en revanche sont classés automatiquement dans la catégorie « très favorable » : les pistes cyclables, les investissements destinés à faciliter la marche ou dans les transports en commun ; à l’inverse, les dépenses en carburants pour alimenter la flotte de la ville sont directement catégorisées comme défavorables.
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Même si la façon de s’approprier cette méthode suscite des débats. « Les salaires, qui représentent une grosse part de nos dépenses, sont compliqués à caractériser » explique Audrey Linkenheld, de la Métropole de Lille. Et puis « il faut faire attention à la façon de communiquer » souligne l’élue, qui s’inquiète que des fonctionnaires territoriaux puissent mal réagir mal au fait que leur poste soit classé comme défavorable au climat. Par ailleurs, comment classer l’art et la culture ? « Si je fais une exposition sur le changement climatique, je pense qu’elle doit pouvoir être figurer parmi les investissements favorables pour le climat » observe-t-elle.
Le débat ne fait que commencer.