La Politique agricole commune nouvelle génération : une réforme vers la transition écologique ?

Déterminante pour l’avenir de l’agriculture et la protection de l’environnement dans l’Union européenne, la nouvelle Politique agricole commune (PAC) suscite de nombreuses interrogations. Censée répondre aux défis environnementaux, la question est posée : cette PAC est-elle véritablement plus verte qu’auparavant ?

L’introduction d’un écorégime dans les aides directes

Pour comprendre si la nouvelles PAC prend un virage écologique, commençons par analyser ses changements. Le principal apport en ce sens se trouve dans le nouveau système des aides directes : l’écorégime. Ce dispositif incitatif obligatoire doit être mis en place par chaque État membre pour soutenir les agriculteurs participant à des pratiques bénéfiques pour le climat et l’environnement.

Des écorégimes encore peu définis

Bien que louable sur le papier, l’écorégime soulève toutefois plusieurs questions quant à son intention écologique. En effet, les spécificités sont encore floues et varient d’un État membre à l’autre. Ainsi, certains y voient une occasion pour les pays de continuer à privilégier leurs propres intérêts économiques au lieu de mettre en avant l’adoption de pratiques agricoles vertes.

Les mesures agroenvironnementales-climatiques renforcées

La nouvelle PAC accorde également une importance accrue aux mesures agroenvironnementales-climatiques (MAEC), qui font partie du deuxième pilier, le développement rural. Ces aides, bien que facultatives pour les agriculteurs, ont pour objectif de promouvoir des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement.

Les Plans stratégiques nationaux, outils de la transition verte ?

Concrètement, les MAEC sont mises en place à travers les Plans stratégiques nationaux. Chaque État membre doit élaborer un plan dans lequel il détaille son interprétation de la PAC et définit les mesures agroenvironnementales-climatiques qu’il souhaite mettre en œuvre sur son territoire.
Ainsi, ce sont les États membres, et non plus Bruxelles, qui auront la responsabilité de piloter la mise en place de ces dispositifs censés favoriser la transition écologique.

  • Une plus grande flexibilité : cela peut être vu comme un atout, puisque chaque pays est libre d’adapter cette politique à ses spécificités locales et régionales.
  • Un risque de déséquilibre : toutefois, cette subsidiarité comporte aussi le danger de créer des différences entre les politiques nationales, voire de concurrence déloyale entre agriculteurs européens.

Une PAC toujours majoritairement financée par des aides directes

Le système de financement de la PAC reste articulé autour des aides directes, ou « paiements de base », destinées à soutenir les revenus des agriculteurs. En d’autres termes, le montant des aides perçues par un agriculteur est bien souvent proportionnel à la taille de son exploitation :

  • Courroie de transmission : cette approche peut être favorable à l’investissement et donc à l’innovation dans les pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement;
  • Maintien du statu quo : néanmoins, pour beaucoup, ce mode de distribution des aides ne permet pas de s’éloigner suffisamment du modèle productiviste dominant et peu respectueux des objectifs environnementaux de la PAC.

La condition méconnue des « eco-schemes »

Là encore, une partie non négligeable des aides réparties au premier pilier (25 %) sera sous condition et liée à des engagements environnementaux, les «eco-schemes». L’enjeu consiste alors à définir précisément ces engagements afin qu’ils soient réellement incitatifs pour encourager les agriculteurs à adopter des pratiques plus vertes. Mais là aussi, les contours des « eco-schemes » restent flous, et leurs effets sur la transition écologique se devinent encore difficilement.

Conclusion : vers une PAC en demi-teinte ?

En résumé, si la nouvelle PAC prend indéniablement quelques virages écologiques, notamment avec la création de l’écorégime et le renforcement des mesures agroenvironnementales-climatiques, elle n’en reste pas moins largement perfectible. Les particularités nationales, ainsi que les modalités d’application et de financement des nouvelles dispositions laissent la porte ouverte à une PAC qui ne serait qu’à moitié verte.