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Le Parlement européen veut protéger 30% des terres et des mers

Le parc El Retiro vu du ciel, à Madrid. Photo EP

Les eurodéputés réclament une protection « stricte » des forêts anciennes et primaires, considérées comme vulnérables et de haute valeur écologique.


Une nouvelle étape a été franchie du côté de la stratégie sur la biodiversité de l’Union européenne. Le 8 juin, les euro-députés ont largement adopté – à 515 voix pour/90 contre – le rapport d’initiative portant sur ces enjeux à l’horizon 2030. Un texte qui doit nourrir la réflexion de la Commission avant qu’elle ne présente sa proposition législative mi-juillet. Parmi ses mesures phares, la nécessité de protéger au moins 30% des écosystèmes terrestres et 30% des espaces maritimes de l’UE. Pour l’heure, 25,7% des terres et 11,1% des mers constituent déjà des aires protégées, notamment au travers du réseau Natura 2000. Ce qui impliquerait donc d’augmenter de 4,3 et 18,9% la part respective de ces sites pour atteindre les objectifs. Sachant que le choix de ces aires reviendra aux Etats-membres, qui pourront se caler sur les critères fixés par la Commission cette année.

Désaccords sur les forêts


Dans ce cadre, il a été décidé que les forêts anciennes et primaires devaient bénéficier d’une protection « stricte ». Une avancée qui suppose des objectifs juridiquement contraignants. Ce qui n’est pas sans susciter de vives critiques. Surtout de la part du Parti populaire européen (PPE) et du groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE). Même si au final, leurs amendements ont été rejetés.
« Nous n’avons pas pour les forêts de politique commune comme la PAC ou la politique commune de la pêche, concède César Luena, rapporteur du projet (S&D). Néanmoins des compétences communes existent dans ce domaine, et certains euro-députés refusent de l’admettre ».

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Faible santé des arbres

De cette posture naissent de nombreux désaccords. Autour du projet de planter 3 milliards d’arbres au sein des 27 d’ici 2030 selon des critères écologiques par exemple. Ou du concept de gestion durable. « Aujourd’hui, nous disposons d’une définition de la gestion durable des forêts mais pas d’indicateurs relatifs à la biodiversité ni de seuils de référence pour mesurer ce qui est durable et de ce qui ne l’est pas. En résumé, nous disposons d’une définition mais pas d’application pratique », insiste César Luena. Or, poursuit-il, « si notre gestion était vraiment durable, les espèces d’arbres ne diminueraient pas et les habitats forestiers en état de conservation favorable ne se cantonneraient pas à une part de 15%, comme c’est le cas actuellement».

Arrêter le déclin des abeilles

Outre la préservation de ces écosystèmes, de manière plus contrôlée, le Parlement prône également la mise en oeuvre « d’objectifs contraignants en faveur d’une biodiversité urbaine », ajoute l’eurodéputé socialiste Eric Andrieu. Pour ce faire, il évoque, entre autres, « la mise en place de toitures végétalisées sur les nouveaux immeubles ».

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Parmi les autres urgences figure également « une action rapide pour arrêter le déclin de la population d’abeilles et autres pollinisateurs ». Avec à la clé, l’objectif concret d’une réduction de 50% de l’usage des pesticides d’ici 2030.
Le rapport conclut en préconisant d’allouer 20 millions d’euros par an à la biodiversité. Une cause qui doit désormais « être mise sur un pied d’égalité avec le climat », insiste Eric Andrieu.

Allier climat et biodiversité


Ce discours s’inscrit dans la droite ligne des recommandations de certains scientifiques. Début juin, 50 experts issus du GIEC et de l’IPBES, deux groupes de chercheurs dédiés respectivement à la recherche sur le changement climatique et la biodiversité, ont pour la première fois publié un rapport commun qui préconise de mener de front les luttes contre ces deux défis.
« Ces enjeux sont interconnectés, ils partagent les mêmes causes qui sont en partie liées à l’activité humaine et à nos modes de consommation et de production », a rappelé le chercheur Hans-Otto Pörtner, co-président du comité scientifique. « Des politiques ambitieuses de réduction des émissions permettent de protéger la biodiversité et les contributions apportées par la nature permettent d’atténuer le changement climatique ».
A condition cependant de ne plus surjouer l’une de ces politiques contre l’autre. Par exemple en implantant des éoliennes dans des espaces riches en biodiversité ou en menant des politiques de compensation carbone à une échelle insoutenable, au détriment des terres agricoles.

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Article réalisé en partenariat avec la Fondation Heinrich Böll